Les cinq premières minutes

Je me suis souvent épuisée à essayer de démarrer un cours face à trente élèves qui ont chacun une bonne raison de ne pas se mettre tout de suite au travail. Un élève saigne du nez, un autre a perdu son stylo, un troisième a fait éclater sa cartouche d’encre sur le cahier d’un quatrième, un cinquième pleurniche sur sa mauvaise note de maths rendue au cours précédent et je ne sais quoi d’autre.

Forte de ces expériences de frustration, j’en suis venue à une technique simple que j’applique dans toutes mes classes de primaire, collège et lycée.

Je commence toujours mon cours par une activité orale collective qui implique d’emblée, dès les cinq premières minutes, l’ensemble de la classe. Ainsi, tous les élèves démarrent le cours ensemble, dans un même élan, dans un même souffle.

Cette activité orale collective peut prendre des formes très variées. Elle se transforme en prise de parole en continu pour une chanson, une comptine, un poème ou la récitation d’une leçon. Elle devient une activité orale interactive, à deux ou plusieurs, pour un jeu de rôle, un jeu télévisé, un concours lexical, des devinettes, un sketch, ou la récitation d’un dialogue ou d’une leçon.

L’énergie que dégage une telle activité collective peut être telle qu’elle fait vibrer les murs de la classe. C’est dans ces moments-là que l’élève prend pleinement conscience qu’il fait partie d’un groupe. C’est là un élément régulateur, essentiel pour cadrer la prise de parole de chacun en cours de langue.

Je lance l’activité et reste en retrait pendant son déroulement. Cela donne à chacun, quelque soit son niveau, le temps de se remettre dans le bain linguistique sans être d’emblée évalué, jugé ou corrigé. Je peux me déplacer dans la classe pour tendre l’oreille vers l’un ou l’autre, mais j’essaie de ne pas intervenir à ce stade pour ne pas casser le rythme du groupe.

Si évaluation il y a, elle n’interviendra qu’une fois cette mise en route collective effectuée.

Ces cinq premières minutes sont tout simplement précieuses car elles donnent à chacun, y compris aux plus faibles ou aux plus timides, le temps de retrouver ses repères en langue étrangère. Au fil des séances, j’ai noté que les élèves développent une certaine aisance à l’oral n’ayant plus peur de se lancer dans ce cadre rassurant et valorisant.


 

 

1 commentaire sur Les cinq premières minutes

  • lobo

    Je suis professeur d’espagnol en collège. Je découvre votre blog avec beaucoup de plaisir, grâce au Café Pédagogique. Il me semble très riche et rempli des bonnes idées, que je compte mettre en pratique, comme ces 5 premières minutes de cours.
    Pour ma part, mes élèves se mobilisent pour dire (et faire )de petites choses en début d’heure (en espagnol, bien sûr): « est-ce que je peux effacer le tableau?, est-ce que je peux dire la date d’aujourd’hui?est(ce que je peux écrire la date au tableau?est-ce que vous avez corrigé…? est-ce que je peux mettre la fiche d’appel à la porte? est-ce que je peux ouvrir/fermer la fenêtre?
    En début d’année, cela se fait sur la base du volontariat, ensuite, quand je vois que ce sont toujours les mêmes qui prennent la parole, je fais le point avec la classe et j’annonce que cela leur rapportera des points s’ils sont volontaires pour dire et faire quelque chose. Finalement, quand je repère des élèves qui ne le font toujours pas je me mets d’accord avec eux sur la phrase qu’ils vont devoir dire le cours suivant (ils ont toujours un choix entre au au moins 4 phrases), et en général, ça marche. Vers le milieu de l’année cela se fait de manière tout à fait naturelle et on peut rajouter d’autres phrases sur le même modèle (est-ce que je peux…, est-ce que tu peux…, est-ce que vous pouvez..?). Même les élèves qui ne sont pas très forts savent dire ces phrases et je pense que ça leur donne envie de faire mieux, ils voient que c’est possible de dire quelque chose et d’être compris dans une langue étrangère.